Aller au contenu

ALPHONSE BAGLAN : un livret individuel bien rempli

Je n’ai pas de portrait et je suis loin de tout savoir sur la vie de cet homme. Mais le travail sur son livret individuel et les sources disponibles ont permis de faire un récit de son parcours jusqu’en 1944.

Baglan Alphonse Benjamin est né le 9 octobre 1872 à Cogners, près de Saint-Calais, en Sarthe.

Ses parents, François Baglan et Renée Rocher s’installèrent plus tard à la Chapelle-Huon, toujours à proximité de Saint-Calais. Lorsqu’il se fit recenser, Alphonse ne vivait pas en Sarthe : il résidait à Authon, en Eure-et-Loir où il exerçait la profession d’agriculteur (il y resta d’ailleurs probablement jusqu’à son départ à la caserne). Cependant, toujours domicilié en Sarthe, c’est là qu’il fut recensé en décembre 1892 puis qu’il tira au sort.

Alphonse fut le 126e de son canton à tirer au sort début 1893. Il tira un gros numéro : le « 130 », ce qui le classa parmi ceux qui ne devaient faire qu’un an de service actif au lieu de trois. Toutefois, il ne partit pas fin 1893 comme les autres hommes de sa classe : il fut ajourné pour faiblesse. Il repassa devant le conseil de révision en 1894 et fut reconnu bon pour le service armé. Il ne fut donc incorporé au 103e régiment d’infanterie que le 13 novembre 1894. Il fut libéré le 24 septembre 1895 après son année de service actif.

En entrant à la caserne, il savait lire, écrire, monter à cheval et conduire une voiture. Il ne profita pas de son passage sous le drapeau pour apprendre à nager. On estima que son instruction militaire était suffisante pour être mobilisable le 1er février 1895, et qu’elle était achevée le 1er avril 1895. Au cours de son instruction, il réalisa 15 séances de tir au fusil sur un champ de tir de 600 mètres, 3 probablement en 1894, 12 en 1895. Il ne semble pas avoir été un tireur particulièrement adroit, ne réalisant en 1895 qu’un score de 58 pour ses 12 séances, dont un zéro pointé lors de la 6e.

Une fois revenu à la vie civile avec son certificat de bonne conduite, il resta quelques années à la Chapelle-Huon, probablement chez ses parents. Il s’y maria le 1er juin 1897 à Ranvoisée Marie Juliette, jeune femme qui vivait à Bessé-sur-Bray, en Sarthe. C’est d’ailleurs dans cette commune qu’il s’installa en février 1899 et qu’il ne quitta qu’en 1913 pour Saint-Georges-de-la-Couée.

Ce qui est surprenant dans ce livret militaire, c’est que la partie concernant sa description physique est fortement dégradée mais pas la fiche mentionnant la taille de ses différents éléments d’uniforme. Elle se révèle même très précise. On constate qu’en une vingtaine d’années, ses mensurations ne changèrent pas. À chaque période d’exercices, on lui attribua des effets de la même taille.

La partie concernant sa description physique mentionne qu’il mesure 1,65 mètre (contre 1,60 mètre lors de son tirage au sort), qu’il a les yeux gris et les cheveux châtains.

Sa première période de 28 jours, il la fit au 103e RI du 8 mai au 4 juin 1899. Il ne participa donc pas aux manœuvres d’automne, pas plus que lors de sa période suivante qu’il fit cette fois-ci dans le régiment le plus proche de chez lui, le 115e RI de Mamers du 2 au 29 juin 1902. Il en fit une troisième en 1909 au 27e RIT du 29 septembre au 7 octobre.

  • Mobilisé

Concerné par le rappel à l’activité dû à la mobilisation le 2 août 1914, il ne rejoignit la caserne que le 24 novembre 1914 sans que le motif de cet appel tardif ne soit expliqué. Il est précisé qu’il fut « convoqué du 1er août au 28 octobre 1914 » au service des GVC mais il n’est noté en campagne qu’à partir du 24 novembre. Affecté à cette date au 27e RIT dont le dépôt est à Mamers, c’est probablement à ce moment qu’il fut dirigé vers la zone des armées.

Une fiche d’évacuation par train sanitaire nous apprend qu’Alphonse était affecté à la 3e compagnie du 27e RIT et qu’il fut évacué pour « Anémie et faiblesse générale ». Bien que non datée, cette fiche ne peut avoir été complétée qu’à cette période. Il dut rester très peu de temps dans le régiment dans la zone des armées. Il passa le 21 février 1915 au 29e RIT sans qu’il soit possible de dire s’il partit au front ou s’il resta à Dreux au dépôt de ce corps.

La liste des vaccinations contre la fièvre typhoïde laisse penser qu’il resta à Dreux : en effet, on devait faire l’ensemble de la série de vaccinations avant l’envoi d’un homme en renfort au front. Or, ces quatre vaccinations ont lieu les 13 et 20 février, les 6 et 13 mars 1915.

Il passa devant la commission de réforme de Paris n°2 le 20 avril 1915 qui le classa « service auxiliaire ». Le 22 avril 1915, il fut « dirigé sur le dépôt de Dreux. Rayé des contrôles du corps ledit jour » pour « hernie inguinale double », on le renvoya dans ses foyers le lendemain.

Mais l’armée n’en a pas fini avec Alphonse : il passa devant une nouvelle commission de réforme, celle du Mans, le 14 septembre 1915 (suite à la loi Dalbiez) qui à nouveau le classa « Service armé ». Dès le 4 octobre suivant, il revint à la caserne à Mamers, toujours au 27e RIT. Il rejoignit la 15e compagnie du dépôt le 15 octobre et passa devant une nouvelle commission de réforme à La Roche-sur-Yon le 9 juin 1916 qui le classa « SX », abréviation usuelle pour « Service auxiliaire ». Il ne retourna probablement pas au front entre ces deux derniers passages devant une commission de réforme.

Cette fois-ci, c’est une fiche collée dans le livret individuel qui nous apprend ce qui se passa pour Alphonse après juin 1916 : il fut mis en sursis du 2 août au 15 novembre 1916 comme batteur à Saint-Georges-de-la-Couée.

Nouveau trou dans la chronologie jusqu’au 1er juin 1917, date à laquelle Alphonse devint détaché agricole catégorie A : il rentra dans ses foyers exploiter sa terre à Saint-Georges-de-la-Couée. Un fascicule de détachement était collé sur la première page de son livret afin d’attester de sa situation en cas de réquisition.

Avant sa démobilisation le 14 janvier 1919 suivie de sa libération de ses obligations militaires le 1er octobre 1919, un dernier document nous apprend qu’il fut géré par le 31e RAC. Non qu’il soit réellement devenu artilleur, mais c’est ce dépôt qui était chargé d’encadrer les détachés agricoles dans le département de la Sarthe.

Il ne faut pas s’étonner de l’absence du fascicule de mobilisation dans le livret. D’abord, la classe 1890 aurait dû en terminer avec ses obligations militaires en 1918. Ensuite, un document porte la mention « En cas de rappel de son échelon, le titulaire reste dans sa commune comme mobilisé agricole » : en cas de reprise des hostilités en 1919, cet homme serait resté détaché agricole.

  • Le refus de sa demande de carte d’ancien combattant

Sans surprise, en 1937, sa demande de carte d’ancien combattant fut refusée. L’administration lui demanda de justifier sa demande. Il répondit par une lettre manuscrite où il fit la chronologie de ses affectations. On ne trouve pas la moindre mention d’un envoi dans la zone des armées. Ce courrier ne permet pas de mieux cerner le parcours d’Alphonse Baglan. On ne peut que dire :

– du 2 août 1914 au 20 février 1915 : 27e RIT

– A partir du 21 février 1915 : 29e RIT. « Dirigé sur le dépôt de Dreux le 22 avril 1915 ».

– Rappelé à l’activité le 4 octobre 1915 au 27e RIT.

  • Sa vie après-guerre :

Si on a la certitude qu’il était toujours en vie en 1937 grâce à sa demande de carte d’ancien combattant, il a été difficile de suivre sa piste. Après le recensement de 1921, sa famille disparaît des lieux où elle avait déjà résidé et de Saint-Georges-de-la-Couée. Seule la fille aînée s’est mariée et est restée vivre dans cette commune.

C’est grâce à l’indication de son décès dans les tables de successions et d’absences du Grand-Lucé qu’on sait qu’il est décédé le 3 août 1944 à Courdemanche.

  • Sources :

– Livret individuel d’Alphonse Baglan, collection R. Despert.

– Fiche matricule d’Alphonse Baglan, classe 1892, matricule 126 au bureau de recrutement de Mamers, Archives départementales de la Sarthe, 1 R 1039.

– Liste de tirage au sort, arrondissement de Saint-Calais, classes 1892 et 1893, Archives départementales de la Sarthe, 1 R 669 et 1 R 670.

– Demande de carte de combattant, dossier du refus, Archives départementales de la Sarthe, 3 R 369.

– Registres des déclarations de mutations par décès, Archives départementales de la Sarthe, 3 Q 8159.

Retour aux parcours de mobilisés

Publication de la page : 7 janvier 2016

Étiquettes:

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *