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La fiche matricule (1) : la retrouver

Un document indispensable parfois difficile à retrouver

Une fois que le jeune homme a été recensé, son parcours militaire commence et va suivre des étapes qui vont se succéder suivant une organisation stricte et fixées par la loi de recrutement. Pour suivre le parcours de ses recrues, l’armée dispose d’un outil qui fait notre bonheur le plus souvent : le registre matricule.

Certes, la numérisation et la mise à disposition dans tous les départements des registres matricules est une aide incroyable malgré l’échec de la mise en place d’un outil de recherche global. Reste que comprendre son élaboration permet de trouver ce que l’on cherche plus facilement.

  • Un document incontournable

Le fiche matricule d’une recrue n’est qu’une feuille, chargée parfois de « papillons » par maque de place. De grand format, certes. Elle regroupe toutes les informations recueillies depuis son recensement jusqu’à la fin de ses obligations militaires, quelques décennies plus tard. Mise à jour le plus souvent rigoureusement, elle permet d’en savoir un peu plus sur les personnes sur lesquelles nous faisons des recherches, même s’il faut l’avouer, le résultat nous laisse souvent sur notre faim par le faible nombre d’informations.

Comme son nom l’indique, le registre matricule est un registre (!) comprenant théoriquement au maximum 500 fiches. Il arrive que certains en aient moins, que d’autres en aient plus, ou que des registres soient reliés par deux, donnant un ensemble de 1.000 fiches matricules.

Chaque fiche porte sur un homme. On parle de fiche matricule car chaque recrue porte un numéro matricule qui lui est propre. Ce matricule est appelé « matricule au recrutement » pour le différencier du « matricule au corps » donné lorsqu’un homme intègre une unité.

Plus généralement, ce numéro matricule, associé à la classe et au bureau de recrutement, permet de retrouver à coup sûr un homme. Organisation administrative mais aussi pratique : ce sont les informations que les hommes portaient sur la médaille à leur poignet qui permettait de les identifier en cas de décès. Ce matricule ne change jamais.

  • Différents modèles de fiches matricules

Les fiches matricules utilisées sont standards et sont remplies en respectant des instructions identiques dans tous les bureaux de recrutement. Cependant il ne faut pas s’étonner de voir différents modèles être utilisés. Au moins cinq modèles de fiches furent utilisés chronologiquement. Certains modèles semblent utilisés tout au long de la période qui va d’avant 1887 à 1910, d’autres, comme le dernier ci-dessous, plus tardivement, tenant compte des modifications dans les détails du signalement à consigner. Mais cette utilisation varie aussi d’un bureau de recrutement à un autre.

  • L’attribution du matricule à la recrue

Avant 1905, l’attribution du matricule se fait de la manière suivante : le conseil de révision va de canton en canton. Dans le premier canton visité, on attribue le matricule 1 à la personne qui a tiré le numéro 1. Et ainsi de suite. Quand on passe au canton suivant, celui qui tire le numéro un se voit attribuer le matricule qui suit celui du dernier du précédent canton. Les matricules sont donc classés par canton et par numéro tiré.

Après 1905, plus de tirage au sort. La répartition se fait toujours par canton suivant l’ordre de visite du conseil de révision cette année là, mais cette fois-ci la première personne par ordre alphabétique obtient le numéro 1 et ainsi de suite. Dans le second canton, on continue la liste des matricules en repartant par ordre alphabétique. Les matricules sont donc classés par canton et par ordre alphabétique parmi les habitants de chaque canton et non uniquement par ordre alphabétique.

  • Retrouver la fiche matricule d’une recrue

Pour retrouver une recrue, en plus de son nom et de son prénom :

– sa date de naissance qui détermine sa classe de recrutement. Année de naissance + 20 = classe de recrutement. Ainsi, une personne née en 1894 appartient à la classe 1914.

– son lieu de domicile à 20 ans, lors du recensement (pour faire simple, au mois de décembre de l’année de ses 20 ans, puis 19 ans à partir de 1913). Attention, pas le lieu de naissance mais bien le lieu du domicile. Et le domicile n’est pas la résidence…

Une fois ces deux informations sur la recrue obtenues, reste à aller à la chasse au registre matricule. Pour ce faire, il faut maintenant déterminer le bureau de recrutement. Bien souvent, il y en a deux par département. Avec la commune, vous trouverez sans mal le bon bureau aux Archives départementales du département du lieu de domicile de la recrue. Attention toutefois : il arrive que des bureaux intègrent des communes d’un autre département. Avant un long déplacement, il ne faut pas hésiter à prendre contact avec les Archives départementales.

Deux outils pour vous aider à retrouver le bureau de recrutement :

– A l’aide de l’outil réalisé par l’association Ancestramil, pour la période 1898-1913, en partant de la commune de domicile  : accès direct à l’outil.

– A l’aide de la carte des régions militaires et des listes des subdivisions qui les composent : voir sur ce site.

Une fois aux archives (ou sur le net de plus en plus, voir la liste des Archives départementales donnant accès aux tables ou aux fiches matricules et la classe la plus récente disponible), pour retrouver plus facilement une recrue, les registres matricules d’une classe possèdent toujours une table alphabétique : les recrues y sont classées par ordre alphabétique et le matricule ainsi que le volume sont indiqués.

La matricule se trouvant en face du nom et des prénoms du conscrit vous indique la fiche matricule à consulter, et souvent le numéro du registre matricule (de 1 à 500 pour le volume 1, de 501 à 1.000 pour le volume 2 et ainsi de suite).

  • Présents et absents des registres matricules : les difficultés de la recherche

Il est fréquent dans nos recherches de recrues de ne pas arriver à mettre la main sur un registre matricule. Il y a au moins sept explications possibles :

–  Ce qui compte, ce n’est pas le département de naissance. Même si le plus souvent, cette information suffit à trouver la recrue, en réalité, nos ancêtres étaient bien plus mobiles que ce que l’on imagine souvent. Il y a donc nombre d’hommes qui avaient changé de domicile au moment de leur recensement. Attiré par la ville, voire la capitale, un travail de journalier dans un département qui a besoin de main d’œuvre agricole, bailleur d’une ferme ou ayant épousé une femme d’un département limitrophe ; les explications à cette situation sont multiples et peuvent toutes avoir la même conséquence : l’absence du conscrit dans le bureau de recrutement de son lieu de naissance. Et il est vrai qu’en l’absence d’informations sur le lieu où il vivait à 20 ans, cela peut être problématique.

– Toutes les informations concordent pour dire qu’un homme est d’un bureau de recrutement mais la consultation de la table alphabétique ne le mentionne pas. Hélas, les erreurs de copie arrivent et on peut se retrouver dans le cas de devoir tourner les pages d’un registre matricule une à une pour retrouver celle que l’on cherche. Pour le bureau de recrutement de Lille avant guerre, il y a parfois plus de 6.000 conscrits par an.

– Le nom dans la table alphabétique est celui recherché, mais c’est un autre nom qui se trouve dans la fiche matricule au matricule indiqué. Une fois encore, c’est une erreur de la personne qui a établi la table alphabétique. Il faut aller tourner les pages pour retrouver le conscrit et son vrai numéro matricule.

– Autre erreur du secrétaire qui peut être rencontrée : un prénom qui n’est pas celui de l’homme recherché. 

– Votre homme n’est pas inscrit sur le registre matricule car impropre au service militaire. Ce cas est prévu par les instructions pour remplir le registre matricule, mais il pourrait aussi se cacher dans un registre matricule dans un autre département. Pour essayer de le savoir, il faut consulter la liste de tirage au sort et de recrutement cantonal du canton dans lequel il résidait à 20 ans. Le résultat de la décision du conseil de révision y est notée.
Attention : il est possible qu’une personne n’ayant pas eu de fiche matricule établie en même temps que les autres hommes de sa classe en ait une ajoutée en fin de registre matricule de sa classe en raison de ses passages devant le conseil de révision ou une commission de réforme pendant la guerre.

– Le registre matricule du bureau de recrutement est perdu. C’est hélas le cas dans quelques bureaux de recrutement. Par exemple dans le Nord :

« Une grande partie des registres des bureaux de Dunkerque et Valenciennes ayant été détruits par faits de guerre, nous ne disposons plus, pour certaines classes de ces bureaux, que de quelques états signalétiques et des services très sommairement reconstitués (appelés  » feuillets nominatifs de contrôle »). » Ces feuillers nominatifs de contrôles sont de différents modèles, mais bien souvent pratiquement vides.

– Le cas des omis, des naturalisés et des engagés volontaires peut parfois entraîner des difficultés pour localiser le registre matricule. Dans ce cas, le plus souvent, il s’agit de chercher dans les tables alphabétiques des autres classes. Mais en général, ils sont notés à la fin des tables de la classe à laquelle ils devraient appartenir par leur date de naissance. Ici, le cas des naturalisés est le plus compliqué et fait l’objet d’un sujet spécifique.

  • Ne pas confondre !

Il y a lieu de ne pas confondre « fiche matricule », « registre matricule », « livret matricule », « liste matricule » et « livret individuel ».

La fiche matricule vient d’être évoquée dans cette page : document qui centralise toutes les informations sur un conscrit au bureau de recrutement de la subdivision. Ces fiches sont reliées par classe et par 500 pour donner un registre matricule.

Le livret matricule est un document tenu au niveau de la compagnie. Il est tenu pour chaque homme, y compris les officiers. Il est établi par l’officier du bureau de recrutement qui y indique l’état civil, le signalement, les dates de passage dans les différentes étapes du service militaire, la date de libération définitive. Le livret est ensuite transmis au corps d’affectation de l’homme et est complété par le commandant de compagnie. Il y note la date d’arrivée au corps, les grades successifs, les services, condamnations, les périodes d’exercices, les blessures, les distinctions, les lettres de félicitations, les récompenses, les punitions (supérieures à 3 jours de consigne de quartiers) et leur motif, les mutations, les objets et effets confiés à l’homme. Après envoi au bureau de recrutement, ce livret est détruit lors de la libération définitive de la recrue.

La liste matricule est un document particulier établi pour immatriculer les engagés volontaires et les réservistes qui ont changé de subdivision à l’occasion d’un « transfert » de domicile. Peut-être détruit une fois tous les hommes enregistrés dans le registre matricule de leur classe de recrutement ou leurs obligations militaires achevées, certains volumes ont été et sont consultables aux Archives départementales, série R.

Chaque homme dispose d’un livret individuel qu’il doit pouvoir présenter à toute demande de la gendarmerie ou de l’autorité militaire. Les informations sont théoriquement les mêmes que celles du livret matricule sans les condamnations.

La suite de la recherche :

Comprendre la distinction entre classe de recrutement et classe de mobilisation. Voir la page à ce sujet.

Comprendre la distinction entre domicile et résidence. Voir la page à ce sujet.

Tout savoir sur le livret individuel. Voir la page à ce sujet.

Présentation du livret matricule et comparaison entre le livret matricule et la fiche matricule.

  • Sources :

Instructions pour la tenue des registres matricule.

Le livret matricule.

– Recrutement de l’armée N° 68. Commissions spéciales de réforme. Volume mis à jour à la date du 15 octobre 1918. Éditions Charles-Lavauzelle, Paris, 1918.
Pour tout savoir sur la commission de réforme (composition, fonctionnement, critères, documents administratifs…). Accès sur Gallica.

– Anonyme, L’infanterie en un volume, manuel d’instruction militaire à l’usage des élèves-caporaux, sous-officiers, élèves-officiers de réserve candidats aux écoles de Saint-Maixent ou de Saint-Cyr, Librairie Chapelot, Paris, édition de 1914. Pages 923 à 928.

Publication de la page : 2 janvier 2011 – Dernière mise à jour : 16 août 2023.


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