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Trésors d’archives n°24 – Saint-Martin-de-Ré, noms gravés

    Il arrive que des traces des conscrits du siècle dernier soient encore visibles dans des lieux inattendus. Les murs de la forteresse de Saint-Martin-de-Ré en est un bon exemple. Ces graffitis mènent-ils aux conscrits qui les ont réalisés ?

  • Localisation

    Les photographies ont été prises en 2019 à l’entrée est de la citadelle de Saint-Martin-de-Ré. Les pierres de calcaire étudiées sont bien visibles car plus blanches que les autres.

    Trois identités donnent assez d’informations pour essayer de les retrouver.

  • Trompette Moïse Bigot, classe 1905

    Un nom certes assez courant mais avec un prénom qui l’est moins offre plus de chances de retrouver le conscrit. L’homme identifié offre plusieurs garanties pour affirmer qu’il s’agit du bon : il est de la région et a été trompette.

    Classe 1905, le jeune jardinier Moïse Bigot est affecté au 14e Bataillon d’Artillerie à Pied. Une batterie à Saint-Martin-de-Ré nécessite la présence d’artilleurs. C’est sans l’ombre d’un doute à cette batterie qu’il réalise une partie de son service actif. Le 12 juillet 1907, il devient trompette. Il a donc gravé cette pierre entre 1907 et septembre 1908, date à laquelle il quitte le service actif après ses deux ans.

    Le message n’a pas pu être gravé pendant la guerre. Bien que mobilisé dès le 2 août 1914, son auteur n’a aucune affectation le positionnant sur l’île de Ré. En effet, la batterie de Saint-Martin-de-Ré est tenue par la batterie territoriale 13T (3e RAP). Or, Moïse Bigot a été affecté au 1er Régiment d’Artillerie Coloniale en 1913 pour sa seconde période d’exercices et en 1914, il n’est pas encore territorial.
    Transféré dans l’infanterie coloniale en février 1915, il est blessé à La Chalade le 16 mai 1915. De retour au front, il est malade en août 1916. Le 12 juillet 1918, il passe au 52e RIC et finit la guerre intoxiqué par gaz le 16 octobre 1918. Il est démobilisé en mars 1919.

    L’espace où Moïse Bigot a gravé son nom était peut-être utilisé pour l’entraînement des musiciens. En effet, on trouve des mentions de trompette et de tambour dans d’autres gravures.

  • Duréleau, tambour

    On aurait pu penser que les gravures sur une pierre dataient de la même période. Celle réalisée par Duréleau est environ 20 ans plus ancienne que celle de Bigot.

    « Duréleau » est un nom présent dans le département de Charente-Maritime. Un seul a été tambour. Il s’agit d’Alexandre Duréleau, classe 1887. Ce jeune cultivateur est affecté au 123e RI dont une petite partie des effectifs est casernée à Saint-Martin-de-Ré. Deux indices font penser qu’il s’agit du bon conscrit, malgré l’absence de prénom et de classe. D’abord, il devient tambour le 23 septembre 1890. Ensuite, à la fin de ses trois ans de service actif, il s’installe à Saint-Martin-de-Ré. Aucune période d’exercices n’a dû le conduire à revenir graver son nom ainsi. Il n’a pas été mobilisé pendant la Première Guerre mondiale.

  • D’autres résistent…

    Il ne fait aucun doute que le soldat Courthial était tambour. Il l’a dessiné : baguettes et tambour sont bien visibles. Par contre, le « 1874 » indique-t-il la classe ou l’année ? Quant au « 123 d L » c’est une manière de noter « 123e de Ligne », c’est-à-dire le 123e RI. Aucun soldat Courthial au 123e RI n’a été retrouvé pour l’instant.

    Une partie de la pierre a été grattée puis les lettres ont été regravées. La personne qui a refait les lettres s’est-elle trompée ? C’est une autre hypothèse.

    Un peu plus loin, dans un angle de mur on peut lire : « Albert Bujaud, trompette, classe 1894 compte encore […] jours et la fuite ». Tout est gravé : prénom, nom, classe, spécialité… mais il n’a pas été retrouvé non plus.

  • En guise de conclusion

    Le mur est réellement recouvert de noms gravés, hélas difficilement lisibles sur les photographies. D’autres recherches sont donc possibles pour les curieux. Ce mur n’est pas le seul à avoir accueilli les noms des soldats dans la citadelle de Saint-Martin-de-Ré. En voici un autre exemple :

https://www.passionmilitaria.com/t33852-graffitis-sur-les-murs-du-fort-du-st-martin-de-re-123e-ri

Photographies du mur en haute résolution sur simple demande par mail.

  • Sources

Archives départementales de Charente-Maritime :

– 1 R 133 : fiche matricule de DURELEAU Alexandre, classe 1887, matricule 939 au bureau de recrutement de La Rochelle.

– 1 R 308 : fiche matricule de BIGOT Moïse, classe 1905, matricule 929 au bureau de recrutement de La Rochelle.

Cliché aérien :

IGN, C1428-0053_1964_FR760IR_0201. Prise de vue du 15 mai 1964.

Mise en ligne de la page : 23 mai 2021.


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