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Chez le photographe : le décor

Mise en scène et décors stéréotypés

La photographie, ce sont des personnes, mais aussi un environnement. En extérieur, le décor est le plus souvent ce qui se trouve derrière le sujet : une porte, un bâtiment, un paysage (jardin, pré, …). En intérieur, il en est tout autrement : dans la majorité des cas, il s’agit de toiles, propriétés du photographe.

  • Mise en place du décor :

On ne perçoit pas toujours la toile, support du décor du photographe : c’est toujours un trompe-l’œil visant à mettre le sujet dans un cadre stéréotypé. Représentant un parc, plutôt diffus, il permet de donner l’illusion de l’extérieur en profitant de la qualité de la lumière de l’intérieur. Sans que cette liste ne se veuille exhaustive, voici quelques exemples de décor :

  • Scène d’intérieur
  • Avec quelques accessoires pour renforcer l’impression d’intérieur
  • Fond en extérieur
  • Fond de camp militaire
  • Fond simple

Il arrive que le décor soit visible car le tirage montre l’ensemble de la plaque de verre et non le recadrage. Cela permet d’observer le système, simple et qui peut être déplacé.

Accessoirement, ce peut même être l’occasion de découvrir, en plus du dispositif permettant de tenir la toile, une partie de l’atelier de l’artisan, comme celui de Victor Chanal au Puy-en-Velay :

Tous ces décors étaient vendus par des entreprises d’accessoires d’ateliers photographiques. Le vocabulaire exact était « fonds continus » quand le fond formait aussi un tapis qui empêchait de voir la coupure au niveau du sol et de « porte-fonds » pour l’appareillage servant à tenir la toile. On trouve de nombreuses allusions à ce matériel dans les revues spécialisées de l’époque :

Leur réalisation était artisanale : il s’agit de fonds entoilés peints à la main. Ceci peut expliquer des variations pour un même modèle et des effets de trompe-l’œil plus ou moins réussis.

  • Des décors originaux :

La récurrence de certains décors sortant de l’ordinaire attire le regard. Il y a des sortes de modes, des exemples de toiles proposées aux clients et qui ont eu un certain succès si l’on en croit le nombre d’exemplaires rencontrés.

Voici quelques exemples de toiles devant lesquelles ou dans lesquelles les soldats se faisaient photographier.

  • En avion

L’aviation passionne les foules. Ce symbole de modernité, vu comme un sport dans la presse, est représenté de multiples manières : articles de presse, cartes postales… Plusieurs décors ont été créés dans lesquels les clients pouvaient se faire photographier (je me borne aux militaires, ce type de décor était aussi utilisé par des civils).

Ce sont le plus souvent des monoplans qui sont représentés. Il s’agit rarement de photomontages (bien que l’on en trouve) mais d’une habile illusion d’optique : le décor est composé de deux panneaux. Une estrade permet aux personnes de se placer comme si elles étaient dans le fuselage. C’est l’angle de l’appareil photographique qui va créer l’illusion en raccordant visuellement les deux plans du décor.

Cette technique n’était pas propre aux photographes français. En voici un exemple en Allemagne pendant la guerre :

  • Toiles de « la revanche »

Je mets volontairement « toile » au pluriel car ces deux exemples montrent que si les grands traits et la symbolique sont identiques (Lion de Belfort, symbole de résistance en 1870), l’exécution des toiles diverge dans les détails, en particulier dans la représentation du canon ou la présence d’un avion.

  • Remerciements :

La diffusion de cet article n’aurait pas été possible sans l’autorisation de monsieur de Framond, directeur des Archives départementales de Haute-Loire que je remercie pour sa réponse positive rapide.

  • Pour aller plus loin sur ce sujet :

Je conseille la lecture de deux ouvrages qui abordent de manière très précise deux aspects de la photographie d’atelier au début du XXe siècle :

– « Les photographes dunois : 170 ans de photographie à Châteaudun. », Bulletin de la société dunoise (2012). N°302.

En retraçant l’histoire des photographes dans cette ville, cette association montre à la fois l’évolution mais aussi la présence importante de cette profession dès le XIXe siècle.

– Jean Distel, Un photographe à Sablé, Joseph Malicot, Sablé-sur-Sarthe, éditions Joseph Malicot, 2013.

Cette fois-ci, c’est la carrière d’un photographe qui est retracée au travers de ses clichés et de son atelier. Le plus ici, c’est que son atelier est en train d’être reconstitué par une association, et pour avoir eu la chance de le visiter, c’est une expérience unique qui replonge dans un atelier de photographe du début du XXe siècle, tout simplement.
https://ateliermalicot.wixsite.com/ateliermalicot

  • Source :

Archives départementales de Haute-Loire, 30 Fi

Europeana, contribution 1985.

Archives municipales d’Abbeville, image 1, image 2.


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