Livio Robin, L’histoire en 1000 images, tome 2 : La Grande Guerre, 1914-1918, Paris, Cercles Européen du Livre, 1963, 319 pages.
La préface du livre par André Ducasse n’est pas obligatoirement gage d’un ouvrage de grande qualité. S’il a rédigé au moins deux références sur ce conflit, celui-ci n’en fait pas partie.
Édité à l’occasion du cinquantenaire du début de la Première Guerre mondiale, cet ouvrage souhaite en proposer une histoire abondamment illustrée. 1963, époque où la télévision se développe et où il semble nécessaire de fournir de l’image. Ce sont donc pas moins de 1000 photographies (et une poignée de cartes) qui illustrent cet épais volume.
Grâce à son abondante illustration, c’est un livre agréable à consulter. Il ne s’agit pas d’un simple catalogue d’images. Elles sont là pour illustrer un récit très complet du conflit. Elles viennent donc compléter le texte, texte qui fournit la grille de lecture.
C’est là finalement le premier problème : ce ne sont que des illustrations. Et la lecture donne l’impression que dans certains cas l’auteur s’est contenté de suivre la méthode suivante : il faut un char, tiens en voilà un. Et peu importe si ledit char n’est pas de cette période… Si le problème n’est pas spécialement visible jusqu’en septembre 1914, il devient flagrant ensuite. En fait, ici ce n’est pas la matière qui a manqué mais la rigueur dans son utilisation. On arrive à un usage aberrant des fonds : une image spectaculaire d’attaque de tranchées (311) utilisée pour parler d’octobre 1914 et, inversement, une image de territoriaux encadrant des prisonniers en août 1914 mise pour la défaite allemande en octobre 1918 (966) ! Pourtant l’auteur ne cherche ni le spectaculaire ni le morbide, ce qui aurait pu, comme c’est le cas pour les galeries de portraits, donner un travail d’une toute autre qualité.
Second problème, le texte n’est pas exempt d’erreurs et de choix assez classiques dans l’approche.
La plus belle erreur est la mention de chars français utilisés en 1916 pour reprendre le fort de Vaux, avec une image (727) à l’appui. Mais on peut aussi mentionner l’apparition des casques début 1915 (462) alors qu’il ne s’agissait que de cervelières ou l’utilisation de photographies d’avant-guerre de pontonniers pour illustrer les inondations en Belgique (424 et 425) et d’une photographie de 1918 pour montrer les attaques allemandes dans le même secteur en 1914 (431). Et ce ne sont que quelques exemples…
Pour ce qui est de l’approche, elle se veut généraliste. Elle traite le conflit sous presque tous ses aspects (politique, économique, géographique, militaire). Toutefois le côté humain est peu développé et, s’il aborde tous les fronts, c’est un livre qui se focalise sur la France. Ainsi, la bataille de la Somme n’est illustrée que par quatre photographies montrant des troupes britanniques, contre plus d’une quinzaine pour les troupes françaises.
Pour compléter cette présentation, la répartition du nombre de photographies dévolues à chaque période est très parlante :
112 images pour l’avant-guerre et l’entrée en guerre ;
217 images pour les combats en Belgique et la bataille de la Marne ;
4 images pour les batailles navales de 1914 ;
29 images pour la guerre qui s’enterre ;
29 images sur le front de l’Est ;
44 images pour la course à la mer et les combats en Belgique
Soit un total de 435 images pour 1914.
209 photographies et cartes traitent de l’année 1915 (Offensives de 1915, Italie, guerre totale et Orient) ;
139 images pour l’année 1916 (Verdun, la Somme, la faim en Allemagne, la guerre totale et sous-marine, la Roumanie).
94 images pour l’année 1917 (États-Unis, Russie, front Ouest).
123 images pour 1918 (des offensives allemandes à la paix).
La part belle est donc donnée très nettement au début de la guerre, l’année 1914 représentant à elle-seule près de la moitié des photographies. La répartition des images dans les thèmes montre aussi la prépondérance du front Ouest.
- En guise de conclusion
On a donc une histoire événementielle, essentiellement militaire et diplomatique, dans la logique de l’époque. On voit clairement tout le chemin parcouru depuis, que ce soit dans la lecture des événements ou les thématiques présentées. Il y a 50 ans, mutineries, troupes coloniales, fraternisations, vie du combattant n’étaient pas au cœur des problématiques.
Un ouvrage proposant une vision globale du conflit mais reposant sur un texte à la fiabilité douteuse et un choix iconographique ne tenant pas toujours compte de la réalité observable.
Disponible en occasion, mieux vaut se rabattre sur un ouvrage plus récent et illustré car les prix demandés sont souvent peu en rapport avec la qualité relative du contenu. D’autant plus qu’il utilise des fonds très célèbres (ECPAD, IWM pour ne citer que ces deux exemples) qu’on retrouve dans de nombreux ouvrages mieux légendés et avec une impression de meilleure qualité.
Cette édition est complétée par un livret de cartes appelé Atlas de la guerre 14-18. La qualité de ces cartes est nettement meilleure que celles de l’ouvrage. Il n’est composé que de sept cartes. Édité à l’occasion du cinquantenaire, il est possible qu’il ne soit pas toujours présent dans les exemplaires d’occasion.
- Pour aller plus loin :
Ce livre n’est pas une rareté même si son alter-ego sur la Seconde Guerre mondiale est plus fréquent. Une dizaine d’euros semble un prix raisonnable pour un livre daté.
https://www.abebooks.fr/servlet/SearchResults?cm_sp=SearchF–topnav–Results&kn=la%20guerre%201914-1918%20en%201000%20images&sts=t