L’éventail des comportements humains est immense. Il convient de ne pas faire d’un cas une généralité : si on observe des cas de conscrits utilisant tous les subterfuges pour échapper à leurs obligations, d’autres au contraire voyaient dans leur rejet du service armée une humiliation. Pierre Roucoules appartenait à ce second groupe.
- Pierre Roucoules devant le conseil de révision
Pierre Recoules est né le 8 mai 1893 à Barre dans le Tarn. Il n’a pas un parcours classique car lorsqu’il est recensé, il a un niveau d’instruction de « 5 ». D’ailleurs, il est déjà instituteur. Mais pour lui, le résultat du Conseil de révision n’est pas celui attendu.
A Monsieur le Préfet du Tarn à Albi
Monsieur le Préfet
J’ai l’honneur de vous prier, Monsieur le Préfet, de vouloir bien me convoquer pour le conseil de révision qui aura lieu à Albi, le 6 novembre, pour la révision des ajournés.
J’ai été ajourné au conseil de révision du 29 septembre à Murat-S-Vebre pour insuffisance de constitution. N’ayant jamais été malade et n’ayant aucune infirmité pouvant me dispenser du service militaire, je tiendrai à passer un deuxième conseil de révision et être incorporé au mois de novembre 1913. De plus j’ai passé deux examens médicaux, l’un à Rodez pour l’école normale, l’autre à St Pons (Hérault) pour rentrer dans l’enseignement laïque, et tous les deux avec succès.
Le numéro de recrutement cantonal correspondant à mon nom est 21. Je compte donc Monsieur le Préfet sur une convocation en vue du deuxième conseil.
Recevez Monsieur le Préfet l’hommage de mon plus grand respect.
P. Recoules
Instituteur à Campagnac par Montmiral (Tarn)P.S. Je vous envoie ci-joint un timbre de 0,10 pour une réponse s’il y a lieu.
A Campagnac, le 15 octobre 1913.
Ce courrier, reçu le 16 à la préfecture obtient une réponse dès le 17 dont on ignore le contenu. Cependant la fiche matricule nous permet de reconstituer son parcours à partir de cette lettre.
Ses états de service nous apprennent que la dispense est justifiée par une « insuffisance de développement ». Il n’y eut pas d’autres visites après, ce qui semble indiquer que sa demande ne fut pas suivie d’effet. En tant qu’ajourné de la classe 1914, il passa devant le conseil de révision de la classe 1914. Le résultat ne fut pas plus à la hauteur que le premier : on lui diagnostiqua une « infirmité légère de la jambe gauche ».
Ce n’est que le 20 janvier 1915 qu’il obtint ce qu’il souhaitait : il fut « Pris bon service armé » par la commission de réforme de Castres. Incorporé le 28 janvier 1915 au dépôt du 40e RI, il fut instruit jusqu’au 27 avril 1915 avant d’être envoyé dans la zone des armées. Il resta une quinzaine de jours au 9e bataillon du 112e RI avant son envoi en unité combattante au 203e RI. Il y gagna ses galons de caporal le 7 octobre 1915 puis de sergent le 1er octobre 1916. Il reçut même une décoration dès le 2 novembre 1915. Il tomba malade fin janvier 1918, fut évacué et retourna au dépôt jusqu’au 25 août 1918. Il rejoignit une unité combattante le 31 octobre 1918. Sa carrière militaire s’acheva par un stage au centre d’instruction de Joinville le 22 avril 1919 et une démobilisation le 26 septembre 1919.
Il reprit sa carrière d’instituteur à Cuq-Toulza, Aguts et Senouillac et fut encore mobilisé trois semaines en 1939.
Pierre Recoules est décédé le 14 mai 1982 à Gaillac dans le Tarn.
- Sources :
Archives départementales du Tarn : https://archives.tarn.fr/accueil
– 1 R 1_570 – Dossiers individuels en lien avec le conseil de révision, année 1913.
– 1 R 2_202 : fiche matricule de RECOULES Pierre, classe 1913, matricule 854 au bureau de recrutement d’Albi-Carcassonne.
– 4 E 23/10 : état civil de la commune de Barre, actes de naissance 1893-1896, acte 11, vue 4/37.
