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Trésor d’Archives n°49 – Acte de succession chez le notaire

Rien ne prédisposait le soldat Joseph Boyau1 à être l’objet d’une recherche particulière. En tant que tué au combat, sa fiche matricule est des plus succinctes : une date de mobilisation, un lieu et une date de décès.

Extrait de la fiche matricule de BOYEAU Joseph Auguste, classe 1906, matricule 628 au bureau de recrutement d’Angers. Source : AD49, 1 R 1123.

C’est sur sa vie civile que des éléments ont été trouvés.

  • La vie de Joseph Boyau

Joseph est né en 1886 à Beauveau dans le Maine-et-Loire dans une famille d’agriculteurs. Soit il ne passa que ponctuellement sur les bancs de l’école communale, soit il ne montra pas un grand intérêt pour les matières enseignées. En tout cas, il avait une écriture et une lecture hésitantes avec son niveau 2 au degré d’instruction générale à son recensement. Déjà noté comme cultivateur à 19 ans, il fut déclaré bon pour le service actif par le conseil de révision et fut affecté au 125e RI de Poitiers. Après ses deux ans de service actif, il fut libéré fin septembre 1909. Il retourna au 125e RI pour sa première période d’exercices à la fin de l’été 1911.

Entre ces deux passages sous l’uniforme, Joseph se maria. Il épousa à Seiches-sur-le-Loir Joséphine Pivert le 22 novembre 1909. En novembre 1911 naquit leur premier enfant : Joseph, toujours à Seiches. Le 21 juin 1913, ce fut au tour de Madeleine de voir le jour, dans la même commune. En l’absence d’accès numérique à l’état civil de la commune de Seiches ou du recensement, difficile de dire où le couple vivait s’il n’y avait pas eu l’acte notarié. Celui-ci nous apprend que par acte passé devant le notaire de Seiches le 17 février 1911, Joseph et son épouse sont locataires de la ferme de Beaulieu. Ils prennent en fait la succession du père de Joseph, Henri Boyau, qui louait la ferme depuis 1897 comme nous l’apprend la date du bail initial (15 février 1897) notée dans l’acte de location passé toujours devant le même notaire de Seiches le 9 juillet 1905.

Extrait du tableau d’assemblage du cadastre de la commune de Seiches-sur-le-Loir, 1830.
Source : AD49, 3 P 4 / 351 / 1.

Mobilisé dès le début du conflit, il partit avec le 135e RI, régiment le plus proche de son domicile. On ne sait rien de son parcours précis, s’il a été évacué à un moment ou un autre jusqu’à la date fatidique du 26 avril 1915. Ce jour-là, il fut tué à Lizerne, en Belgique. Le jour de son arrivée dans le secteur, le 135e RI participa à une action offensive. Joseph fut l’un des 150 soldats perdus à cette date.

Toutefois, Joseph n’est pas disparu : il y a eu des témoins de sa mort. Administrativement, un avis officiel du Ministère de la Guerre est daté du 2 juillet 1915 et son acte de décès est transcrit sur le registre à Seiches le 20 août 1915. La liquidation de sa succession peut avoir lieu.

  • Gérer les siens et les biens

Henri Boyau, le père de Joseph, devint tuteur de ses petits-enfants suivant la décision du conseil de famille qui se déroula devant le juge de paix du canton de Seiches le 21 octobre 1915.

L’inventaire après décès fut organisé à la ferme le 7 décembre 1915. La prisée est utile pour observer la vie de Joseph avant son départ. Dire que le montant total se chiffre à 16941 francs ne nous en apprend guère, d’autant qu’il faut penser aux 8951 francs de passif (dont 700 francs empruntés à une personne qui n’a pas été nommée dans l’acte). Par contre, on observe que la ferme possédait trois pièces à vivre, une cuisine et deux chambres, auxquelles s’ajoutaient un grenier, un atelier, une cave, une écurie et une « boulangerie ». Il y avait trente et un animaux : quatre bœufs, quatre taures2, deux bouvards3, quatre vaches, un veau, un cheval et deux juments avec une pouliche, deux canards, deux truies et huit porcelets.

C’est finalement l’occasion d’observer ce que possédait une personne au quotidien. Ainsi, la garde-robe de Joseph se composait de deux vêtements, douze chemises, six paires de chaussettes, douze mouchoirs, une montre en argent et sa chaîne. Le tout pour une valeur estimée à 25 francs.

  • En guise de conclusion

Si cette source ne nous apprend rien concernant la vie militaire, elle donne un éclairage particulier sur la vie civile de certains mobilisés.

  • Sources :

Archives départementales du Maine-et-Loire :

– 1 R 1123 : fiche matricule de BOYEAU Joseph Auguste, classe 1906, matricule 628 au bureau de recrutement d’Angers.
https://www.archinoe.fr/v2/ark:/71821/f55436a42037622707e959ec5cc99e8b

– 5 E 130/168 : Notaire Seiches-sur-le-Loir

– 5 E 164/29 : étude de maître Rabouin, Seiches-sur-le-Loir, juillet-décembre 1915.

– 3 P 4 / 351 / 1 – Tableau d’assemblage du cadastre de la commune de Seiches-sur-le-Loir, 1830.

Service Historique de la Défense :

– SHD GR 26 N 869/7 : JMO du 135e RI (décembre 1914-juin 1915)


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  1. Comme le note le notaire dans l’acte de 1915, le nom s’écrit « Boyau ou Boyeau » suivant le document. ↩︎
  2. https://www.cnrtl.fr/definition/taure ↩︎
  3. https://www.cnrtl.fr/definition/bouvard//1 ↩︎

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