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Le livret individuel (2)

Comparaison avec les informations de la fiche matricule

Quand le livret individuel a été perdu ou plus souvent quand il a été pris lors de la capture, le duplicata qui est remis plus tard au soldat est très incomplet. Par contre, quand on a la chance d’avoir le livret original, il peut se révéler être une source beaucoup plus complète que la fiche matricule. Celui d’Alphonse Baglan en est un excellent exemple.

  • Un livret individuel bien rempli

Le livret individuel d’Alphonse Baglan comporte déjà en lui-même une quantité importante d’informations. En plus, son propriétaire, ou un de ses descendants, y a laissé certains documents administratifs ainsi que deux objets personnels, dont ses plaques d’identité, qui le complètent.

Voici le récit qu’il est possible de réaliser. Il est suivi d’une seconde biographie, écrite cette fois-ci avec la seule fiche matricule. Les éventuelles informations supplémentaires par rapport au livret militaires sont en vert. La lecture des deux a pour objectif de confirmer mon affirmation initiale, à savoir qu’un livret militaire peut se révéler bien plus complet qu’une fiche matricule.

Baglan Alphonse Benjamin est né le 9 octobre 1872 à Cogners, près de Saint-Calais en Sarthe. Ses parents, François Baglan et Renée Rocher s’installeront plus tard à la Chapelle Huon, toujours à proximité de Saint-Calais. Lorsqu’il se fait recenser, Alphonse ne vit pas en Sarthe : il réside à Authon, en Eure-et-Loir où il exerce la profession d’agriculteur. Cependant, toujours domicilié en Sarthe, c’est là qu’il fut recensé en décembre 1892 puis qu’il tira au sort.

Alphonse fut le 126e de son canton à tirer au sort début 1893. Il tira un gros numéro : le « 130 », ce qui le classa parmi ceux qui ne devaient faire qu’un an de service actif au lieu de trois. Toutefois, il ne partit pas fin 1893 comme les autres hommes de sa classe : il fut ajourné. Il ne fut donc incorporé au 103e régiment d’infanterie que le 13 novembre 1894. Il fut libéré le 24 septembre 1895 après son année de service actif. En entrant à la caserne, il savait lire et écrire et il ne profita pas de son passage sous le drapeau pour apprendre à nager. On estima que son instruction militaire était suffisante pour être mobilisable le 1er février 1895, et qu’elle était achevée le 1er avril 1895. Au cours de son instruction, il réalisa 15 séances de tir au fusil sur un champ de tir de 600 mètres, 3 probablement en 1894, 12 en 1895. Il ne semble pas avoir été un tireur particulièrement adroit, ne réalisant en 1895 qu’un score de 58 pour ses 12 séances, dont un zéro pointé lors de la 6e.

Une fois revenu à la vie civile, il resta quelques années à la Chapelle-Huon, probablement chez ses parents. Il s’y maria le 1er juin 1897 à Ravaugée Marie Juliette, jeune femme qui vivait à Bessé-sur-Bray, en Sarthe. C’est d’ailleurs dans cette commune qu’il s’installa en février 1899 qu’il ne quitta qu’en 1913 pour Saint-Georges-de-la-Couer.

Ce qui est surprenant dans ce livret militaire, c’est que la partie concernant sa description physique est fortement dégradée mais pas la fiche mentionnant la taille de ses différents éléments d’uniforme. Elle se révèle même très précise. On constate qu’en une vingtaine d’années, ses mensurations ne changèrent pas. À chaque période d’exercices, on lui attribua des effets de la même taille.

Sa première période de 28 jours, il la fit au 103e RI du 8 mai au 4 juin 1899. Il ne participa donc pas aux manœuvres d’automne, pas plus que lors de sa période suivante qu’il fit cette fois-ci dans le régiment le plus proche de chez lui, le 115e RI de Mamers du 2 au 29 juin 1902. Il en fit obligatoirement une troisième en 1909 comme l’attestent le tableau de taille des effets et son tableau de résultats au tir.

Concerné par le rappel à l’activité dû à la mobilisation le 2 août 1914, il ne rejoint la caserne que le 24 novembre 1914 sans que le motif de cet appel tardif ne soit expliqué. Son affectation n’est pas précisée, mais il doit s’agit du 27e RIT dont le dépôt est à Mamers. Il est affecté le 21 février 1915 au 29e RIT sans qu’il soit possible de dire s’il partit au front ou s’il resta à Dreux au dépôt de ce corps. La liste des vaccinations contre la fièvre typhoïde le laisse penser : en effet, on devait faire l’ensemble de la série de vaccinations avant l’envoi d’un homme en renfort au front. Or, ces quatre vaccinations ont lieu le 13 février, le 20 février, les 6 et 13 mars 1915.

Une fiche d’évacuation par train sanitaire qui nous apprend qu’Alphonse était affecté à la 3e compagnie du 27e RIT et qu’il fut évacué pour « Anémie et faiblesse générale ». Non datée, seules les informations du livret indiquent qu’il est en campagne contre l’Allemagne du 24 novembre 1914 au 23 avril 1915.

Il a dû rester très peu de temps dans le régiment au front avant d’arriver au 29e RIT.
Il passe devant la commission de réforme de Paris n°2 le 20 avril 1915 qui le classe « service auxiliaire ». le 22 avril, il est « dirigé sur le dépôt de Dreux le 22 avril 1915 . Rayé des contrôles du corps le dit jour ». Il est renvoyé dans ses foyers, le 23 avril 1915.

Mais l’armée n’en a pas fini avec Alphonse : il passe devant une nouvelle commission de réforme, celle du Mans, le 14 septembre 1915 qui le classe à nouveau « Service armé ». Dès le 4 octobre suivant, il est de retour à la caserne à Mamers, toujours au 27e RIT. Il rejoint la 15e compagnie du dépôt le 15 octobre et passe devant une nouvelle commission de réforme à la Roche-sur-Yon le 9 juin 1916 qui le classe « SX », abréviation usuelle pour « Service auxiliaire ». Il n’est probablement pas retourné au front entre ses deux derniers passages devant une commission de réforme.

Cette fois-ci, c’est une fiche collée dans le livret individuel qui nous apprend ce qui se passa pour Alphonse après juin 1916 : il est mis en sursis du 2 août au 15 novembre 1916 comme batteur à Saint-Georges-de-la-Couée.

Nouveau trou dans la chronologie jusqu’au 1er juin 1917, date à laquelle Alphonse devient détaché agricole : il rentre dans ses foyers exploiter sa terre à Saint-Georges-de-la-Couée. Un fascicule de détachement est collé sur la première page de son livret afin d’attester de sa situation en cas de réquisition.

Avant sa démobilisation le 14 janvier 1919 suivie de sa libération de ses obligations militaires le 1er octobre 1919, un dernier document nous apprend qu’il est géré par le 31e RAC, non qu’il soit réellement devenu artilleur, mais c’est ce dépôt qui était chargé de gérer les détachés agricoles dans le département de la Sarthe.

Il ne faut pas s’étonner de l’absence du fascicule de mobilisation dans le livret. D’abord, la classe 1890 aurait dû en terminer avec ses obligations militaires en 1918. Ensuite, un document porte la mention « En cas de rappel de son échelon, le titulaire reste dans sa commune comme mobilisé agricole » : en cas de reprise des hostilités en 1919, cet homme serait resté détaché agricole.

  • Et avec la fiche matricule

Baglan Alphonse Benjamin est né le 9 octobre 1872 à Cogners, près de Saint-Calais en Sarthe. Ses parents, François Baglan et Renée Rocher s’installeront plus tard à la Chapelle Huon, toujours à proximité de Saint-Calais. Lorsqu’il se fait recensé, Eugène ne vit pas en Sarthe : il réside à Authon, en Eure-et-Loir où il exerce la profession d’agriculteur. Cependant, toujours domicilié en Sarthe, c’est là qu’il fut recensé en décembre 1892 puis qu’il tira au sort.

Alphonse fut le 126e de son canton à tirer au sort début 1893. Il tira un gros numéro : le « 130 », ce qui le classa parmi ceux qui ne devaient faire qu’un an de service actif au lieu de trois. Toutefois, il ne partit pas fin 1893 comme les autres hommes de sa classe : il fut ajourné. Il ne fut donc incorporé au 103e régiment d’infanterie que le 13 novembre 1894. Il fut libéré le 24 septembre 1895 après son année de service actif. En entrant à la caserne, il savait lire et écrire.

Une fois revenu à la vie civile avec son certificat de bonne conduite, il resta quelques années à la Chapelle-Huon, probablement chez ses parents.Il s’installa en février 1899 dans la commune de Bessé-sur-Braye qu’il ne quitta qu’en 1913 pour Saint-Georges-de-la-Couer.

La partie concernant sa description physique mentionne qu’il mesure 1,65 mètre, qu’il a les yeux gris et les cheveux châtains.

Sa première période d’exercices de 28 jours, il la fit au 103e RI du 8 mai au 4 juin 1899. Il ne participa donc pas aux manœuvres d’automne, pas plus que lors de sa période suivante qu’il fit cette fois-ci dans le régiment le plus proche de chez lui, le 115e RI de Mamers du 2 au 29 juin 1902. Il en fit obligatoirement une troisième en 1909 au 27e RIT du 29 septembre au 7 octobre.

Concerné par le rappel à l’activité dû à la mobilisation le 2 août 1914, il ne rejoint la caserne que le 24 novembre 1914 sans que le motif de cet appel tardif ne soit expliqué. Il est précisé qu’il est « convoqué du 1er août au 28 octobre 1914 » mais il n’est noté en campagne qu’à partir du 24 novembre. Affecté à cette date au 27e RIT dont le dépôt est à Mamers, il passe le 21 février 1915 au 29e RIT sans qu’il soit possible de dire s’il partit au front ou s’il resta à Dreux au dépôt de ce corps.

Il passe devant la commission de réforme de Paris n°2 le 20 avril 1915 qui le classe « service auxiliaire » pour « hernie inguinale double ». Il est renvoyé dans ses foyers, le 23 avril 1915.

Mais l’armée n’en a pas fini avec Alphonse : il passe devant une nouvelle commission de réforme, celle du Mans, le 14 septembre 1915 suite à la loi Dalbiez qui le classe à nouveau « Service armé ». Dès le 4 octobre suivant, il est de retour à la caserne à Mamers, toujours au 27e RIT. Il passe devant une nouvelle commission de réforme à la Roche-sur-Yon le 9 juin 1916 qui le classe « Service auxiliaire ». Il n’est probablement pas retourné au front entre ses deux derniers passages devant une commission de réforme.

Il est mis en sursis du 2 août au 15 novembre 1916 comme batteur à Saint-Georges-de-la-Couée. Nouveau trou dans la chronologie jusqu’au 1er juin 1917, date à laquelle Alphonse devient détaché agricole catégorie A : il rentre dans ses foyers exploiter sa terre à Saint-Georges-de-la-Couée. Un fascicule de détachement est collé sur la première page de son livret afin d’attester de sa situation en cas de réquisition.

Avant sa démobilisation le 14 janvier 1919 suivie de sa libération de ses obligations militaires le 1er octobre 1919, un dernier document nous apprend qu’il est géré par le 31e RAC, non qu’il soit réellement devenu artilleur, mais c’est ce dépôt qui était chargé de gérer les détachés agricoles dans le département de la Sarthe.

  • En guise conclusion

Cet exemple cherche à montrer que si une source peut paraître très complète, on doit malgré tout toujours chercher à la croiser avec d’autres sources afin de corriger les éventuelles erreurs et de compléter les blancs toujours présents. Le livret militaire peut être une mine d’informations, mais sa richesse va dépendre du soin avec lequel il a été complété par les secrétaires successifs et la présence ou non de documents administratifs parfois collés, souvent glissés pour réunir en un même endroit tout ce qui a trait aux obligations militaires.

Rappel important : il n’est pas délivré de duplicata de livret individuel

Retrouvez la biographie complète du soldat Baglan ici :

  • Sources :

Livret individuel d’Alphonse Baglan, collection R. Despert.

Fiche matricule d’Alphonse Baglan, classe 1892, matricule 126 au bureau de recrutement de Mamers, Archives départementales de la Sarthe, 1 R 1039.

  • Remerciements :

Un grand merci à René Despert pour l’autorisation de travailler sur ce livret individuel.


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