L’histoire des plaques publicitaires Heinz, Kub et Maggi au début de la guerre a déjà été abordée deux fois : au Mans et dans le Rhône. Le cas présent montre l’importance réelle que revêtait la chasse à ces plaques.
Cette histoire est racontée à l’aide d’un dossier les concernant conservé aux archives municipales de Chartres en Eure-et-Loir. Elle permet d’observer qu’outre la gendarmerie, les services municipaux sont aussi engagés dans ces démontages à travers les ordres donnés par le maire et leur application par les gardes champêtres.
- La chasse aux plaques Kub
La mairie de Chartes reçoit, comme les autres communes du département, un télégramme du préfet :
« LE PREFET D’EURE ET LOIR
à Messieurs les Maires.
Je vous prie de prendre d’extrême urgence, d’accord avec la gendarmerie qui a reçu les ordres nécessaires, toutes mesures utiles pour faire détruire sur le territoire de votre commune les panneaux ou affiches de réclame du bouillon KUB, principalement ceux placés près des ouvrages d’art, des lignes de chemin de fer, etc…
LE PREFET D’EURE ET LOIR
Delavaud-Dumonteil »
Non daté, ce document est probablement du 3 ou 4 août comme le montre cet autre exemple.
Seuls deux rapports sont conservés concernant l’application de ces mesures dans la ville : un acte de notification et un rapport du garde champêtre. Ce dernier atteste que le garde champêtre informa la propriétaire d’un terrain situé en plein centre-ville, où se trouvait une plaque à détruire :
« L’an mil neuf cent quatorze, le cinq août, Dix heures.
À la requête et sur l’ordre de M. Le Maire de la commune de Chartres,
Je soussigné Frélon Louis Jacques,
Garde champêtre de la dite commune, y demeurant, commissionné, assermenté et revêtu de l’insigne de ma fonction, le tout conformément à la loi,
Me suis transporté au domicile de madame Raimbert née Ricaud, place Chatelet n°17
Où étant et parlant à la personne
Qui a signé le présent,
J’ai invité madame Raimbert à faire détruire aujourd’hui avant 7 heures du soir le panneau réclame des Bouillons Kub existant sur son immeuble audit lieu.
De laquelle notification j’ai dressé le présent procès-verbal et j’ai laissé copie à la présente notificataire.
Fait à Chartres, le 5 août 1914
Signature
Raimbert Frélon »
L’autre document, non daté – mais probablement du 6 août si l’on suit les documents postérieurs – et non signé signale qu’il existe deux plaques non encore enlevées :
« Le 5 Août à 7 heures du soir en revenant de Paris, j’ai vu du train, à main droite, entre Longsault et Chartres
1° une affiche Kub avec le n° 565
et
2° en arrière des jardins maraîchers de Bourg-Neuf au-delà de l’Arche (?), une pancarte réclame Heintz (sic), bleue, n° 37 parfaitement visible du train. »
Cette information, quelle qu’en soit sa source, est traitée avec sérieux. Le 7 août 1914, une note est envoyée au commissaire de police :
« Une affiche Kub existe encore parait-il vers la croix Jusselin visible de la ligne de Paris à Chartres. »
La réponse est faite le même jour : « Toutes nos recherches faites pour découvrir la dite affiche Kub. Nous n’avons pas découvert son emplacement. L’agent de police Millet »
En complément :
« Je n’ai pu trouver l’affiche K en question ; elle se trouve peut-être du côté de Ouarville, commune de Lèves.
Le garde champêtre Voisin. »
Il ne faut pas confondre la commune de Ouarville au Sud-Est de Chartres et le lieu-dit Ouarville de la commune de Lèves où passe justement encore aujourd’hui la ligne de chemin de fer. Le lieu-dit Longsault et celui de Bourgneuf se trouvent également dans ladite commune.
Aucun document ne vient clore cette enquête, on ne sait donc pas si la plaque fut retrouvée ou si elle avait été retirée entre temps.
- En guise de conclusion
Les articles, les télégrammes et les rapports d’enquête, presse, archives de la préfecture et archives municipales témoignent de l’importance et du sérieux avec lequel fut traité le cas des plaques publicitaires Kub ou Maggi à la mobilisation.
- Sources
Archives municipales de Chartres, Hg 3 36.
Fond de carte : © IGN 2021. Images cartographiques numériques du territoire métropolitain produites par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) dans les années 1950.
Mise en ligne de la page : 18 avril 2021.