Une nouvelle fois, il s’agit de suivre le parcours d’un conscrit à partir d’un document, ici, un article de presse. Direction la Savoie et l’Isère pour découvrir Eugène Pichon, jeune agriculteur pris « bon, service armé » par son conseil de révision. Pourtant, il ne resta pas longtemps à la caserne comme l’atteste un article de presse, confirmé par sa fiche matricule.
Réformé
Grenoble, 17 octobre.
La commission de réforme qui s’est réunie samedi matin, sous la présidence de M. le général gouverneur de Grenoble, a rendu à la vie civile le canonnier Eugène Pichon, de la 9e batterie du 12e bataillon d’artillerie.
Pichon est ce jeune soldat savoisien qui, haut de 1 m. 77, pesait 127 kilos.
Durant son séjour au fort Rabot, il fut un objet de curiosité pour tous ses camarades. C’est que, jusqu’à la dernière minute de son existence militaire, il resta vêtu « en pékin », faute d’avoir pu trouver des « effets » à sa taille.
Avec quelle joie n’a-t-il pas regagné, dans la soirée la commune de Méry (canton d’Aix-les-Bains), son pays natal !
Heureux canonnier.Le Grand National, 18 octobre 1909, vue 3/4.
Né le 14 février 1888, le cas de cet homme n’a pas fait l’objet de doutes de la part du conseil de révision : dès son premier passage, il est placé dans le service armé. Grand et donc fort, il est envoyé dans une unité d’artillerie de montagne.
Il arrive le 7 octobre 1909, soit à Briançon, siège du 12e bataillon d’artillerie à pied, soit directement à Modane où est détachée la 9e batterie à laquelle il est affecté1. Quoi qu’il en soit, il est immatriculé. Cependant, l’étape de l’habillement pose problème comme l’indique, avec ses mots, l’article : on ne trouve pas d’effets à sa taille.
C’est à ce moment qu’il est, suivant toute vraisemblance, envoyé à la caserne Rabot à Grenoble en attendant son passage devant la commission de réforme spéciale.
Dès le 14 octobre, une semaine après son incorporation, il est réformé pour obésité et rendu à la vie civile.
- Eugène Pichon et la Première Guerre mondiale
Tous les hommes réformés avant-guerre doivent se présenter devant le conseil de révision réuni en septembre 1914 pour la classe 1915. À cette occasion, la réforme d’Eugène Pichon est confirmée. Cette réforme est maintenue une nouvelle fois en 1917. Il n’eut donc jamais à revêtir l’uniforme.
Il décède en janvier 1924 en Savoie. Thibaut Vallé a trouvé quelques précisions à ce sujet : Eugène Pichon n’était pas le seul fils de la famille. Un autre était aussi obèse quand un dernier avaient des problèmes psychologiques qui conduisirent à son internement. Quant à Eugène Pichon, il n’avait aucun lien avec son lieu de décès : Bassens. Mais c’est la commune où se situe le centre hospitalier psychiatrique de Savoie.
- En guise de conclusion
Ce sont les seules mentions trouvées dans la presse de ce court passage d’Eugène Pichon à la caserne. Le manque de numérisation de presse pour la Savoie empêche de vérifier si on peut en savoir plus par cette source et plus particulièrement si son cas avait attiré l’attention de la presse lors du conseil de révision ou de l’incorporation.
- Remerciements
A Thibaut Vallé pour les précisions sur le décès d’Eugène Pichon.
- Sources :
AD de Savoie :
1 R 189 : fiche matricule d’Eugène Louis Pichon, classe 1908, matricule 26 au bureau de recrutement de Chambéry.
- Annuaire officiel de l’Armée française, troupes métropolitaines et troupes coloniales, Paris, Ministère de la Guerre, 1910, page 523.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1764616/f547.item ↩︎
Je reste toujours admiratif de vos recherches pour trouver et nous faire partages ces petites « pépites » ..
Il est vrai que j’ai sensibilisé à cet article car je connais bien les lieux cités pour avoir habité la Savoie et l’Isère durant mon adolescence … Méry au pied du massif du Revard pour plusieurs camps scouts dans les années 60, Grenoble où j’ai effectué mon service militaire au 6e BCA en 67-68 ( j’ai visité récemment le musée des Troupes de Montagnes au fort de la Bastille qui rend hommage aux Chasseurs Alpins)… Quand à Bassens je n’en connaissais que les hauts murs quelques peu sinistres à l’époque qui entouraient « l’hopital des fous » comme on l’appelait à l’époque … Nous habitions à Chambéry sur la colline des Monts qui domine la commune de Bassens …
Encore merci pour cet article