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Histoire grand public de la Grande Guerre chez Larousse

FACON Patrick, La Grande Guerre et ses lendemains, 1914/1935, Histoire de France illustrée n°15, Paris, Larousse, 1985, 187 pages.

Cette couverture parle peut-être aux personnes de ma génération. Elle était très présente dans les bibliothèques à partir de 1985. Ce livre appartenant à la collection « Histoire de France illustrée, 2000 ans d’images », est destiné au grand public, mais dans une série plutôt étiquetée « jeunesse ».

La préface est rédigée par une grande signature de cette époque, Pierre Miquel. Il s’agit en réalité plus d’une validation marketing que d’un réel apport tant la présentation faite est très générale, des pays belligérants en passant par les grandes étapes du conflit et les grands courants politiques en France. Au final, rien de très novateur, développé ou enrichissant.

L’ouvrage est divisé en 8 chapitres, mais je ne vais présenter que les 5 premiers, soit 99 pages sur les 160. Les trois autres parties sont consacrées aux années 1919-1935.

1914, la Marne
1915, l’année sanglante
1916, l’année terrible
1917, l’année trouble
1918, l’année de la victoire

Comme son nom l’indique, cette collection visait à offrir une histoire richement illustrée. Tel est le cas : les fonds possédés à l’époque par Larousse permettent d’abondantes illustrations, certes majoritairement très connues mais il y a quelques choix intéressants au niveau de quelques peintures.

Toutefois, il n’y a pas de critique des documents proposés, un certain mélange étant visible entre illustrations d’avant-guerre et d’août 1914, puis entre photographies « à chaud » et photographies posées. Ce sont souvent des clichés largement utilisés. Sur l’exemple ci-dessous, aucune indication sur le lieu, le contexte et surtout sur le fait qu’il s’agisse d’une reconstitution d’époque.

Les illustrations des deux premières pages de chaque chapitre sont le plus souvent en couleurs. Il y a par exemple de belles autochromes (pages 20 et 21) et des reproductions de productions graphiques de l’époque..

  • Un récit très lacunaire

La part de l’écrit n’est pas si importante dans l’ouvrage, la proportion consacrée aux illustrations étant logiquement plus volumineuse. Et ce ne sont pas les légendes qui vont enrichir profondément l’ensemble.

Outre l’absence des autres fronts que ceux situés en France ou concernant les troupes françaises, on observe également des lacunes dans les événements racontés. Certes, les grandes étapes, les grandes batailles sont bien présentes, mais il y a des trous dans la chronologie qui peuvent donner l’impression qu’il ne se passe rien sur le front. Ainsi, dans le premier chapitre on retrouve évidemment l’invasion de la Belgique, l’hécatombe de la bataille des frontières, la victoire de la Marne et la Course à la mer, mais le récit s’achève fin septembre, comme s’il ne s’était rien passé pendant les derniers mois de l’année. Ensuite, on passe directement à 1915.

Le rôle de l’arrière est faiblement présenté, surtout pour évoquer la mobilisation des industries et des femmes, pages 58-59. C’est aussi fait de manière particulière, au milieu d’une année, page 24, sans vraiment montrer d’évolution. Par contre, l’histoire politique est un fil rouge de tout l’ouvrage, de l’Union sacrée au ministère Clemenceau.

Au contraire, on ne trouve rien sur les prisonniers de guerre ou la guerre navale quand les nouveautés dans l’armement sont présentées laconiquement : chars, avions, gaz…

  • Une histoire de France

Sans surprise, le point de vue est exclusivement français et laisse peu de place aux autres belligérants. Tout est systématiquement mis en relation avec les soldats ou le front en France. Ainsi, s’il est question de Gallipoli, c’est juste pour évoquer les troupes hexagonales. Sont évoqués les Britanniques et les Américains quand c’est en relation avec le front en France. L’attaque de la Serbie par l’Autriche-Hongrie fin 1915 n’est mentionnée que pour la présence de troupes françaises. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on peut mieux suivre la situation dans les Balkans que tout autre front hors de France. La Révolution russe est mentionnée pour ses conséquences, non pour les faits, en même temps que l’entrée en guerre des États-Unis, ce qui représente deux pages.

L’année 1918 parle très peu des interventions américaines, des combats en Italie, dans l’Empire ottoman, mais aussi de la guerre maritime, de l’impact du blocus sur l’Allemagne. Par contre, chaque année, une partie non négligeable du texte est consacré à la vie politique en France. Ainsi, on peut suivre l’évolution politique dans le pays en parallèle avec la situation militaire locale.

L’ouvrage s’achève par une chronologie et une série de biographies des personnages politiques et militaires. Sur les 57, 8 sont étrangers, 1 Italien, 4 Allemands, 2 Américains et 1 Britannique.

On notera surtout l’absence de cartes, que ce soit pour visualiser les fronts ou l’aspect mondial du conflit. C’est un vrai manque quand un livre à l’ambition d’être aussi généraliste.

  • En guise de conclusion

Pas moins de 60 pages sont consacrées à l’après-guerre, de 1919 à 1935. Ces pages ne sont pas abordées ici, bien que les constats soient les mêmes : c’est surtout une histoire politique qui est proposée.

Dans l’ensemble, le livre donne une vision du conflit sans trahir la collection qui porte sur l’histoire de France, mais sans sortir d’un modèle classique à l’époque de sa rédaction : histoire politique, histoire militaire ne donnant que des grandes lignes, au niveau des « grands personnages ». Cela donne un récit tellement centré sur la France que le lecteur n’a qu’une vision partielle du conflit qui n’a plus grand-chose de mondiale.


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