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Une enquête en 1919 autour du front d’Orient

Jean-Christophe Rufin, Le collier rouge, Paris, éditions Gallimard, 2014, 160 pages.

J’ai toujours une petite appréhension quand je commence la lecture d’un roman contemporain prenant pour contexte la Première Guerre mondiale voire des hommes l’ayant faite ou la faisant. Peur de ne voir qu’une pâle copie de ce qu’on trouve dans les romans rédigés par des anciens combattants ou de certains témoignages. Pire, peur d’y retrouver une histoire qui n’est en fait qu’une certaine mémoire de cette guerre, reflétant plus la réalité d’aujourd’hui, la vision simpliste qu’on peut parfois se faire de certains événements, qu’une vision assez réaliste de la période, de ce que vécurent ces hommes.

Le roman de Jean-Christophe Rufin ne tombe pas dans ces écueils. Tout au plus pourra-t-on lui reprocher l’utilisation abusive des gendarmes pour aller chercher les recrues des classes mobilisées au cours de la guerre et le fait que son héros ne soit pas parti tout de suite pour la guerre car « soutien de famille ». Comme si cela avait suffi à faire rester des hommes loin du front.

Pour le reste, j’ai été d’autant plus facilement pris dans le récit que son auteur l’a construit sous la forme d’une enquête (et que j’aime suivre les enquêtes en Histoire !). Chaque chapitre apporte son lot d’éléments qui finissent par reprendre tout leur sens au moment du dénouement final.

On pourra être surpris d’avoir été pris dans un récit qui repose sur des éléments finalement aussi simples et que je ne dévoilerai pas ici. Reste que par ses descriptions, par les événements utilisés, sans tomber dans un excès de pathos, de bons sentiments, et surtout sans lourdeur, l’auteur nous pousse à avancer dans le récit pour comprendre tous les ressorts de cette affaire.

Jusqu’à ce que l’on découvre que l’événement déclencheur est un fait réel autour duquel l’auteur a échafaudé « son édifice romanesque ». Un édifice qui, malgré des échappées vers le front d’Orient, est construit autour d’une unité de lieu (un village), de temps (une semaine) et une poignée de personnages : un juge militaire, un chien, un gardien de prison, un prisonnier, une mère et son enfant, un gendarme et quelques autres qui apportent une petite pierre à l’ensemble. Un contexte de retour des hommes, les idées liées à la Révolution d’octobre 1917 (bien peu évoquées dans la littérature en général) et du questionnement sur soi de chacun des protagonistes rendent le récit bien moins simpliste que le nombre de pages ne le laisse présager.

Au final, un roman qui offre quelques heures de lecture autour de cette année 1919, du retour des hommes, de la fidélité dans toutes ses acceptions. Un roman qui ne choquera pas les passionnés et n’induira pas en erreur le lecteur qui connaît peu la période.

  • Pour aller plus loin :

Dossier pédagogique autour du livre et de son adaptation au cinéma : https://www.cercle-enseignement.com/College/Troisieme/Ressources-pedagogiques/Le-collier-rouge2


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