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Trésor d’Archives n°71 – Corps retrouvés après-guerre

Étonnant parcours du corps de ce soldat mort de ses blessures, inhumé, dont la sépulture fut perdue jusqu’en 1923. Cette redécouverte fit l’objet d’une « publicité » de la part d’un abbé chargé d’identifier les corps.

Tout commence donc dans un entrefilet dans la presse eurélienne en 1923 :

Un soldat identifié
A Prunay (Marne) on vient de reconnaître le corps d’un de nos compatriotes mort pour la France. Voici les indications recueillies sur sa plaque d’identité :
Graffin Denis, classe 1911, recrutement de Dreux, matricule 992.
Des renseignements complémentaires peuvent être demandés à M. l’abbé Peck, à Wez-Thuisy (Marne).

La dépêche d’Eure-et-Loir, 26 octobre 1923

Cet abbé listait les effets personnels et les éléments caractéristiques du squelette afin de trouver des indices pour identifier les corps. Les informations étaient ensuite transmises à l’attention des familles de disparus par la presse notamment qui relayait les indices. Les corps retrouvés avec une plaque étaient aussi listés. Notre soldat est donc dans cette catégorie, sans que l’on sache si sa tombe était perdue ou si elle était collective.

  • Le parcours de Denis Graffin et de sa sépulture

Originaire d’Authon-du-Perche, Denis Graffin n’est pas disparu. Par contre, il semble que la trace de sa dépouille ait été perdue jusqu’à ce qu’elle soit identifiée grâce à sa plaque. En effet, on sait qu’il est mort des suites de ses blessures le 13 septembre 1914, avec des témoins qui ont signé son acte de décès. Cet acte de décès a ensuite été transcrit à la mairie d’Authon-du-Perche en 1917. Ce dernier figure d’ailleurs tout près de celui de son père, décédé quelques jours seulement avant cette transcription.

Le parcours de Denis Graffin commence par sa naissance dans une famille marquée par les décès d’enfants en bas âge ou à la naissance et à la mort de sa mère alors qu’il n’a que sept ans. Il est un élève peu assidu, son niveau étant de 1 lors du recensement. Il devient domestique de ferme. Il rejoint en octobre 1912 le 102e RI mais est volontaire pour rejoindre le Maroc. Il est affecté au 1er Régiment de Zouaves à partir de septembre 1913. Il est en zone de guerre un an. Quand la guerre est déclenchée en Métropole, il est rapatrié en France et meurt des suites de ses blessures à Prunay (Marne) le 13 septembre 1914. Difficile d’établir les circonstances de sa blessure, l’identification de son unité exacte étant compliquée et le 1er Régiment de Zouaves de Marches n’ayant pas de JMO pour cette période.

Il est inhumé sur place et son corps est retrouvé soit à l’occasion de la suppression d’un cimetière militaire soit d’un regroupement de tombes. Il est désormais inhumé dans la Nécropole nationale de Sillery (Marne).

Source du cliché : https://www.geneanet.org/cimetieres/view/7555537
  • L’abbé Peck

Cet abbé Peck n’est pas un inconnu de la presse. On retrouve de nombreuses allusions et listes liées à son travail de recherche de l’identité des corps exhumés. Il faut dire que c’est sa fonction : il est délégué par le ministère pour la recherche et l’identification des militaires disparus dans le secteur de Reims et de Mourmelon. Qu’il soit celui qui transmet des informations sur des corps provenant de Prunay ou de Prosnes (dans le second exemple), cela fait sens.

Né en 1878 à Warmeriville dans la Marne, Émile Peck vient d’une famille d’Alsaciens ayant choisi la France après 1871. Séminariste, il est exempté de service actif en raison d’une hernie inguinale. Il rejoint la cure de Beaumont-sur-Vesle en 1907.

Comme tous les exemptés, il doit repasser devant le conseil de révision en décembre 1914. Il est classé « Service auxiliaire » et rejoint une section d’infirmiers militaires (SIM). Il est infirmier-major à l’hôpital de Montmirail. Ensuite, il passe dans une Section de Commis et d’Ouvriers Militaires d’Administration (SCOA). Il est démobilisé le 13 mars 1919 et rejoint sa paroisse dans la Marne. C’est alors qu’il s’installe dans la commune en ruine de Wez.

Il reçoit officiellement la mission d’identifier les corps ce qui le conduit à devenir un intermédiaire pour les familles dans leurs recherches. Cependant, sa santé décline rapidement en raison de problèmes d’urémie. Il décède en mars 1924. Le diocèse de Reims publie une notice nécrologique dans son numéro d’avril 1924 qui a permis de nourrir sa biographie.

  • En guise de conclusion

La belle-mère, ou un autre membre de la famille, prit-elle contact avec l’abbé ? Faute de sources, impossible de le dire. Mais ce simple entrefilet permet d’observer l’une des conséquences de la guerre : la place toujours importante de ses conséquences en 1923.

  • Source :

Archives départementales d’Eure-et-Loir

PER 40 : La dépêche d’Eure-et-Loir, 26 octobre 1923.
https://archives28.fr/ark:66007/s005cef7082a8d18/5d1224d9602da.fiche=arko_fiche_623b47d683fd0.moteur=arko_default_623c6e73da980

1 R 687 : fiche matricule de Graffin Denis Honoré, classe 1911, matricule 992 au bureau de recrutement de Dreux.
https://archives28.fr/ark:66007/s0054c63a2544746/57f3f2ee471f4.fiche=arko_fiche_623b53a024893.moteur=arko_default_623c6d9fefa00

3 E 018/033 : état civil de la commune d’Authon-du-Perche pour l’année 1917. Transcription de l’acte de décès de Denis Graffin. Acte n°4.
https://archives28.fr/ark:66007/s00530320778c6ba/53034b239d60e.fiche=arko_fiche_6241b48e693f9.moteur=arko_default_6241bc24d7427

Archives départementales du Maine-et-Loire :

Le Petit courrier, édition d’Angers, 13 août 1921.
https://recherche-archives.maine-et-loire.fr/v2/ark:/71821/bf473302eaaa6da9cc5bcb43f0507009

Archives départementales de la Marne :

1 R 1246 : fiche matricule de Peck Émile Jean, classe 1898, matricule 2243 au bureau de recrutement de Reims.
https://archives.marne.fr/ark:/86869/26crv7jn8h3q/7fcc0f65-9734-4642-87c5-984842e5ff71?collaborativeIndexation=486b5f5c-7112-4144-9f42-719655a4df94

Gallica :

Bulletin du Diocèse de Reims du 19 avril 1924. Pages 58 à 61.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6307370s/f5.item


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